Pour en finir avec la "politique de la ville" telle que l'Etat la conçoit depuis maintenant 20 ans : une intervention publique in situ dans les quartiers et communes défavorisés. Cette politique s’appuie sur un axe privilégié, reliant, par contrat, l’Etat aux communes ; elle cible des quartiers, désignés par la concentration élevée de ménages défavorisés et de difficultés sociales. La permanence de cette approche a rencontré ses limites comme l'ont noté plusieurs rapports publics (mission d’évaluation André-Hamel, rapport Pupponi-Goulard…) ou analyses d'experts. Ce n'est pas la commune ou le Préfet qui détient les clefs de la cohésion urbaine. C'est l’agglomération qui est l’échelle des solutions et de la solidarité urbaine. Autrement dit, la plus value et la spécificité de l’agglomération résident dans la capacité de cette dernière (la communauté d'agglomération ou urbaine) à agir sur des mécanismes et des interdépendances qui ne sont pas visibles et/ou pas opérants à l’échelle communale.
Dans le champ du renouvellement urbain, le rapport du Comité d’évaluation et de suivi de l’ANRU fin 2009, soulignait ainsi le déficit d’articulation entre politiques sociales (CUCS) et programme de rénovation urbaine (PRU) mais également leur cadre d’intervention trop restreint.
Dans une contribution adressée en 2009 à l'ancienne secrétaire d'Etat à la Ville, l'AdCF notait également : "Nul ne peut mettre en cause les effets positifs, malgré leur hétérogénéité et leur inégale portée, des dispositions législatives spécifiques (LOV, LOADT, Pacte de relance pour la ville, LRU…), des programmes budgétaires et des nombreuses opérations de renouvellement urbain mis en oeuvre depuis plus de vingt ans. Des « reconquêtes » incontestables ont été opérées dans de nombreux territoires. Des parcours individuels ont été soutenus. Des situations sociales très tendues ont pu être surmontées et apaisées. Il est de fait légitime de penser que la situation serait aujourd’hui bien plus dégradée si n’avaient pas été engagés ces programmes massifs et renouvelés de développement social, d’éducation prioritaire, de discrimination positive, de réhabilitation du parc social et des copropriétés dégradées, de gestion urbaine de proximité…
Ces considérations n’interdisent pas pour autant de s’interroger sur l’essoufflement actuel de la politique de la ville et sur son « efficience » (rapport coût-efficacité).
Traduction spatiale de puissantes évolutions de société qui la dépassent (exclusion de l’emploi, développement de la précarité, raréfaction des postes peu qualifiés, fragilisation du modèle français d’intégration et de l’institution scolaire, montée des incivilités, recompositions familiales…), la « politique de la ville » est confrontée à des mécanismes puissants de relégation et de désaffiliation qu’elle ne peut à elle seule enrayer. Malgré les efforts constants affichés pour tendre vers une plus grande mixité sociale, garantir l’accès aux services publics… les processus d’enclavement des quartiers les plus en difficulté n’ont pas été enrayés. Même lors de la reprise économique de la fin des années 1990, période de croissance forte et de créations d’emplois nombreuses, les taux de chômage constatés au sein de nombreuses ZUS avaient progressé à contre-courant des évolutions nationales."
Remise dans le cadre de la consultation relative à la réforme de la géographie prioritaire (ZUS, ZRU, ZFU), cette contribution faisait valoir une unité de conception des stratégies et des documents contractuels en suggérant une nouvelle génération de contrats de cohésion urbaine élaborés à l'échelle de l'intercommunalité. Cette implication renforcée des intercommunalités ne doit pas tendre à les substituer aux communes en matière de gestion urbaine de proximité mais à compléter leur intervention in situ dans les quartiers par des politiques d’agglomération capables de désenclaver les quartiers défavorisés et de peser sur les grands « marchés urbains » : foncier, immobilier, emploi, mobilités….
Le chantier de la réforme de la géographie prioritaire a depuis été mis en stand by par le nouveau Ministre de la Ville, Maurice Leroy qui entend miser sur une nouvelle contractualisation dans le cadre d'expérimentations menées sur un nombre restreints de sites.
Le président de l'AdCF, Daniel Delaveau, a rencontré le 16 mai dernier le nouveau Ministre pour réitérer les propositions de l'association des élus de l'intercommunalité. Le président de l'AdCF a rappelé "la nécessité d’élargir le périmètre de contractualisation, tant du point de vue géographique que thématique, afin de mieux mobiliser les compétences structurantes des agglomérations et intercommunalités au service de projets intégrés de cohésion urbaine (économie, transports urbains, habitat…)."