Je livre ici mon commentaire sur le papier que viennent de publier dans la revue Métropolitiques Daniel Béhar, Philippe Estèbe et Martin Vanier (tous 3 consultants d'ACADIE) sur le sujet des Pôles Métropolitains.
Très enthousiastes sur ce « faux nouvel » outil prévu par la loi du 16 décembre 2010, les auteurs, adeptes de l’inter-territorialité, regrettent tout de même le principe du syndicat mixte fermé qui se traduit par l’absence des « opérateurs historiques » que sont les départements et les région... Certes.
Mais c’est surtout l’Etat et sa technostructure qui gardent la mainmise sur les grands opérateurs et les infrastructures métropolitaines : aéroports internationaux, grands ports maritimes, canaux à grands gabarit, autoroutes urbaines, embranchements ferroviaires des grandes zones logistiques, sans oublier les universités !
L’idée « généreuse » du syndicat mixte « auberge espagnole », ouvert aux départements et aux régions convient davantage à la gestion des petits aéroports régionaux et des petits ports. Les aéroports régionaux sont d’ailleurs le plus souvent cogérés par les départements, les CCI et les agglomérations. Quant aux politiques intermodales de dimension métropolitaine : des syndicats mixtes SRU ou de simples conventionnements entre différentes autorités organisatrices de transports collectifs (Régions, conseils généraux, agglomérations) existent ou fonctionnent déjà !
Enfin, dans le domaine du développement économique et de l'urbanisme opérationnel (l'aménagement), n’oublions pas l’outil de la Société Publique Locale (SPL). Sans constituer une couche syndicale de plus dans le mille-feuilles territorial, il permet de mettre en œuvre de manière opérationnelle des stratégies territoriales qui peuvent, si les institutions veulent bien coopérer, toujours se définir dans le cadre des SCOT. Considérablement renforcé par la loi Grenelle 2, cet exercice de planification territoriale prescriptif invite la région et le département en tant que personnes publiques associées à formuler un avis sur la prise en compte de leurs infrastructures dans la stratégie du document.
Syndicats mixtes ouverts ou fermés, SRU, de SCOT ou métropolitains, SPL : la panoplie instrumentale est large. Mais ces outils ne préjugent en aucun cas la volonté coopérative des acteurs et la capacité des institutions à construire des stratégies territoriales.
Le problème est davantage culturel : la décentralisation est en France inachevée… Nos ports, nos universités, nos aéroports (nos grandes infrastructures métropolitaines) sont encore faiblement insérés dans les projets urbains et territoriaux des collectivités locales. Leurs patrons et manageurs sont issus de la culture de l’Etat jacobin qui veille toujours au grain... Et il est encore rare, en raison du cadre statutaire de la fonction publique territoriale, de trouver au sein des collectivités locales un Monsieur « fret et logistique portuaire », un Monsieur « Aéroport international » ou une Madame « Université et centres de recherche »…
Pour concevoir et mettre en œuvre des stratégies métropolitaines, nous avons donc tout autant besoin d’un Acte 3 de la décentralisation que d’inter-territorialité.