« L’Observatoire des impacts territoriaux de la crise » mis en place début 2009 par l’AdCF et l’Institut pour la recherche de la Caisse des Dépôts et Consignations a livré en mars dernier ses premières conclusions. Confiée à l’économiste Laurent Davezies, chercheur et expert indépendant (L’Oeil), l’étude des impacts de la crise économique de 2008-2009 sur les zones d’emplois françaises permet déjà de dégager quelques grands enseignements, à partir de données statistiques des trois derniers semestres de 2008-2009 (UNEDIC, DARES, INSEE, Banque de France).
Contrairement à ce qu’il s’était produit au cours de la crise immobilière de 1991-1993 et de la récession de 1993-1994, les principales aires métropolitaines françaises et la région Île-de-France semblent avoir bien tenu le choc pour l’instant. « Les territoires productifs les plus modernes, dotés des activités à haute valeur ajoutée, s’en sont généralement mieux sortis que les autres. L’Ile-de-France, qui jusqu’alors amplifiait les retournements conjoncturels, semble désormais mieux les amortir », note Laurent Davezies.
A contrario, les territoires « manufacturiers » des régions industrielles, situés pour l’essentiel dans la partie Nord du pays, souvent éloignés des grandes agglomérations, ont subi de plein fouet l’impact des fermetures d’établissements et des contractions d’effectifs (notamment avec les ajustements opérés sur les postes intérimaires). En territorialisant les données de la DARES et de Pôle Emploi, le rapport provisoire montre que ces bassins d’emploi très spécialisés enregistrent en moyenne une variation de +43% de leur taux de chômage. Très marqués par les sinistres économiques et les destructions d’emploi, ces bassins d’activités traditionnelles disposent en outre d’amortisseurs plus faibles (consommation touristique, base publique, économie résidentielle…) que d’autres zones d’emploi. Ils risquent en outre de subir une « double peine » avec les conséquences financières qu’aura le remplacement de la taxe professionnelle dans les budgets des collectivités de ces bassins. L'excellent média Localtis a d'ailleurs choisi "d'angler" son article sur cet aspect du rapport.
Moins exposés, excepté sur le plan du tourisme international, les territoires résidentiels traversent sans trop de difficultés apparentes cette crise. « Les chocs sur le tourisme, l’immobilier, la construction (…), les ont certes affectés, mais n’ont pas empêché qu’une grande partie du Sud et de l’Ouest du pays, spécialisés dans la réponse à le demande des ménages, n’a finalement que peu souffert de ces deux années de crise « exceptionnelle ».
Prudent dans ses conclusions, encore provisoires, Laurent Davezies devrait restituer une version plus aboutie du rapport, étayée avec les chiffres de l’ensemble de l’année 2009 sur l’emploi (dès que ceux-ci seront disponibles). Pour autant, ces premiers résultats confirment la robustesse de la grille de lecture présentée par l’expert en 2003 à la Caisse des Dépôts et à la DATAR sur les différents moteurs du développement territorial de nos zones d’emploi : productif, public, résidentiel, et social.
A l'inverse, la presse nationale s'est "emparé" fin mars sans précautions de ces résultats pour les rapprocher de ceux des élections régionales... A voir un article de La Tribune, où Laurent Davezies est interviewé.